Archive pour la catégorie ‘Graphismes et pictographies’

L’image rituelle: agentivité et mémoire

Jeudi 20 janvier 2011

Dans le cadre du programme Capes-Cofecub, un colloque se tient au Collège de France les 27-28 Janvier 2011, auquel participent un grand nombre des membres français et brésiliens du projet ANR.


Colloque Capes-Cofecub

l’image rituelle: agentivité et mémoire

Coordination: Carlo Severi et Carlos Fausto

27-28 Janvier 2011

Collège de France

3, rue d’Ulm – Rez-de-chaussée

Qu’elle s’appuie sur l’ornement, la peinture corporelle, le masque ou le pictogramme, la mémoire des peuples « sans écriture » a toujours paru labile, désordonnée, vouée à l’échec. Les « supports mnémoniques » dont parlent les historiens de l’écriture à propos de ces traditions, sont régulièrement décrits comme des tentatives avortées de reproduire la forme extérieure d’un objet, ou comme des moyens graphiques simples d’exprimer des concepts élémentaires. Le travail des anthropologues, en Amérique, en Océanie, en Afrique montre que ces représentations, loin de s’appuyer sur une imitation des apparences, suivent la voie de la représentation chimérique. L’objet est là en tant qu’image à décrypter, témoin visible d’une série d’opérations mentales qui constituent la mémoire d’une tradition. Les arts non-occidentaux, apparaissent alors comme des traditions iconographiques peuplées d’images intenses et fragmentaires dont la forme mobilise un travail du regard qui en suscite les aspects latents. Un certain nombre de recherches permettent aujourd’hui d’approfondir et de généraliser cette nouvelle approche .

Le travail de ces dernières années a fait apparaître, parallèlement à l’analyse des iconographies, un autre phénomène, qui concerne la nature même du concept de mémoire. Au sein de nos sociétés la mémorisation est constamment associée à des textes. Elle peut donc apparaître comme une activité autonome, indépendante de l’énonciation des savoirs. Dans les sociétés sans écriture, au contraire, il est pratiquement impossible de trouver un art de la mémoire dissocié de l’énonciation d’un savoir spécifique. Dans ces sociétés, toute mémorisation est liée, de manière constitutive, à des pratiques d’énonciation spécifiques, très souvent ritualisées. C’est ainsi que le champ de l’anthropologie de la mémoire, d’analyse d’une technique individuelle, devient l’étude des voies de propagation des savoirs au sein d’une société. Ce domaine de recherche implique donc aussi bien l’analyse d’iconographies orientées par l’exercice de la mémorisation que l’étude des conditions pragmatiques d’exercice d’une parole ritualisée. Dans ce champ, l’action rituelle, l’image mnémonique et la pragmatique de l’énonciation se trouvent strictement associés.

Cette focalisation sur les contextes d’usage et des performances conduit à considérer les images, ou les artefacts, non pas uniquement comme des systèmes de signes, mais aussi et surtout comme des systèmes d’actions et de relations. Les objets n’apparaissent plus comme de simples supports d’un symbolisme, mais constituent de véritables moyens d’agir sur autrui, des dispositifs complexes de médiations investis de sens, de valeurs, d’intentionnalités spécifiques.

Dans ce contexte, ce n’est pas seulement l’interprétation de l’objet en tant que personne, qu’il s’agit d’explorer. Au sein de l’action rituelle, l’artefact n’apparaît plus comme la simple « incarnation » d’un être individuel, mais devient l’image complexe d’un ensemble de relations. Pour comprendre les modalités de la transformation en personnes des images rituelles, en tant que témoins de mémoire, il faut donc explorer le champ des subjectivités possibles des objets.


27 Janvier – Jeudi

1ere séance: 9:00 – 13:30

Carlo Severi (EHESS/LAS): Patrocles: Jeu et rituel en Grèce Ancienne

Carlos Fausto & Isabel Penoni (MN/UFRJ): La représentation de l’humain en Amazonie : Les effigies rituelles dans L’Haut Xingu (Brésil)

François Berthomé (EHESS): Corps-à-corps avec les morts. La transe comme modalité d’interaction dans la cérémonie garifuna du dügü (Bélize)

Aparecida Vilaça (MN/UFRJ): Le contexte relationnel du cannibalisme funéraire wari’

Conduite des débats: Anne-Christine Taylor (CNRS/MQB)

2eme séance: 14:30 – 17:30

Marco Antonio Gonçalves (IFCS-UFRJ): Images et Paroles dans le cordel du Nordeste brésilien

Pedro Cesarino (Unifesp): Image, parole et mémoire dans le chamanisme marubo (Amazonie brésilienne)

Pierre Déléage (CNRS): Écritures prophétiques vs. écritures chamaniques (Amérique du Nord)

Conduite des débats: Carlo Fausto (UFRJ/MN)

28 Janvier – Vendredi

3eme séance: 9:00 – 13:00

Julien Bonhomme (MQB): La voix des esprits ou comment faire parler un arc musical

Bruna Franchetto (MN/UFRJ) & Tommaso Montagnani (EHESS): Images et relations sonores chez les Kuikuro du Haut Xingu: flûtes des hommes, chants des femmes

Acacio Piedade (UDESC) Le chant des flûtes: la musique des esprits chez les wauja du Haut Xingu (Brésil)

Conduite des débats: Philippe Descola (EHESS/LAS)

4eme séance: 14:00 – 17:00

Els Lagrou (IFCS-UFRJ): Chimères abstraites: figuration et abstraction en Amazonie Occidentale

Charles Stépanoff (EPHE) : Corps chamanique et espace virtuel: le ‘voyage’ reconsidéré

Discussion finale

Conduite des débats: Carlo Severi (EHESS/LAS)

Les hiéroglyphes micmacs

Lundi 23 mars 2009

Pierre Déléage
présentera une communication sur le thème

Les hiéroglyphes micmacs

L’historien Ignace J. Gelb estimait, dans son ouvrage A Study of Writing, qu’une écriture purement logographique, c’est-à-dire dénuée de composants phonographiques systématisés, n’avait jamais existé. Il considérait impraticable la mémorisation de “milliers de signes pour des milliers de mots” et en concluait qu’un système logographique n’aurait pu être qu’extrêmement instable. Son argument a été unanimement accepté et il est indéniablement vrai en ce qui concerne les quatre grandes écritures originelles (mésopotamienne, égyptienne, chinoise, maya) qui étaient toutes soit logo-syllabiques, soit logo-consonantiques. Les hiéroglyphes des Micmacs (groupe algonquien du Nord-Est de l’Amérique du Nord) forment cependant un contre-exemple intéressant : il s’agit d’une écriture logographique qui demeura stable pendant un peu plus de deux siècles (de 1677 à la fin du 19e siècle). Cette écriture s’est constituée à l’intersection de l’écriture phonographique des missionnaires catholiques et des divers procédés pictographiques des Amérindiens de la région. Nous étudierons les conditions très particulières de sa stabilisation et montrerons que cette technique d’inscription, loin d’être isolée, a été inventée à plusieurs reprises, dans des contextes similaires d’évangélisation, au Mexique, dans les Andes et au Canada.


Mercredi 8 avril de 14h à 16h
Salle 2, Musée du quai Branly, 218 rue de l’université, 75007 Paris

Graphismes et pictographies traditionnels

Lundi 16 mars 2009

Notre approche des traditions graphiques et pictographiques s’appuie sur la conviction que celles-ci doivent nécessairement être appréhendées en fonction de leur contexte d’usage et non selon une perspective sémiotique qui les réduirait à de simples avant-courriers de l’écriture phonographique. C’est pourquoi l’étude de ces traditions doit d’abord prendre en compte le dispositif rituel, d’apprentissage ou d’utilisation, au sein desquels elles se trouvent systématiquement enchâssées. De ce fait, une attention particulière doit être portée aux relations qui unissent ces traditions graphiques à des discours rituels eux-mêmes fortement contraints et déjà très largement stabilisés par des principes poétiques ou rhétoriques. Toutefois, cette perspective ne doit pas conduire à une réduction de ces traditions graphiques aux discours rituels auxquels elles sont associées ; de par leur nature distincte, elles font usage de leur potentiel expressif de diverses manières, débordant ainsi toujours leur assujettissement apparent à l’oralité rituelle.

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